Le chef du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), Fady Dagher, promet de démissionner s’il ne parvient pas à résoudre les problèmes liés au développement des compétences des policiers issus de communautés culturelles. Lors d’une entrevue accordée au Média des Nouveaux Canadiens (MNC) à l’occasion du premier anniversaire de son arrivée à la tête de l’institution, le chef du SPVM dit constater des obstacles en ce sens.
« Ce que nous sommes en train de découvrir, à travers des données internes, c’est que les jeunes des communautés noires sont aussi performants que les autres à l’entrée », dit-il. Mais là où le problème se pose, c’est quand vient le temps de devenir superviseur, de se développer, de devenir sergent… Eh bien, pourquoi ? C’est cela que nous sommes en train de fouiller. »
Pour parvenir à comprendre et à traiter le problème, M. Dagher dit avoir intégré à son cabinet le bureau d’Équité, Diversité et Inclusion (EDI) ainsi que quatre comités impliqués dans la gestion de la diversité au sein du SPVM.
« Ça va brasser »
« Là, je suis responsable. Je ne peux pas dire que je ne suis pas au courant. Une fois informé, il faut agir, il faut résoudre le problème », affirme le chef de la police.
D’ici à l’été prochain, le SPVM sera capable de présenter des chiffres et des faits liés aux difficultés qu’on les membres des communauté culturelles de gravir les échelons au sein de l’institution, « qui ne resteront pas cachés ». M. Dagher souhaite organiser des concours de promotions au sein du SPVM qui lui permettront de rendre les processus de développement de carrière « plus équitables » pour tous.
« Franchement, je suis très enthousiaste à l’idée de le faire, et, selon moi, cela va vraiment brasser », lance le chef de la police. Interrogé sur son appréciation des situations mouvementées, il répond : « Oui, parce que c’est la vérité ».
« Je pense qu’il y a un problème dans le système, qu’il est insidieux, et je veux le résoudre. Sinon, je n’ai pas besoin de rester ; je démissionnerai si je ne peux pas y parvenir », promet le numéro un de la police de Montréal, qui dit bénéficier du soutien politique nécessaire pour mener à bien ces réformes.
Qui est Fady Dagher?
Fady Dagher, né en Côte d’Ivoire de parents libanais, fait partie des minorités visibles. Grâce au programme conventionnel du SPVM, Fady Dagher intègre la police en 1992 après des études en comptabilité et gestion. Il détient une maîtrise en administration des affaires pour gestionnaires (EMBA) de l’Université McGill-HEC et cumule presque 30 ans d’expérience dans le milieu policier. Il a été patrouilleur, enquêteur, et superviseur avant de devenir gestionnaire et chef de police à Longueuil, puis à Montréal.
Une année de recrutement réussie
Selon lui, le problème vient de certains cadres réfractaires au changement. « L’humain, de base, ne veut pas changer, surtout s’il ne reconnaît pas l’existence d’un problème comme le racisme systémique », note Fady Dagher, dont le style de gestion repose sur la persuasion. Il entend les amener progressivement vers ce qu’il souhaite et les contraindre ou imposer des changements en tant que chef.
Il promet de faire de la question du développement des jeunes issus de communautés ethnoculturelles « son cheval de bataille » au sein du SPVM et de veiller à ce que les hautes sphères de la police ne soient pas dépourvues de représentants de ces communautés.
M. Dagher se réjouit de constater que le processus de recrutement de cette année a été fructueux. Année après année, le SPVM recrutait environ 25 policiers de minorités visibles. « Nous avons demandé 135 postes et en avons pourvu 113, dont 65 issus de minorités visibles (Noirs, Indiens, Arabes…). C’est du jamais vu dans l’histoire du SPVM », s’exclame le chef.
Fady Dagher note des progrès concernant les tests de natation de niveau très élevé qui étaient exigés par l’école de police et les cégeps en Techniques policières. « J’ai vérifié avec ces institutions, et ce qui est désormais exigé, c’est de savoir nager », indique le chef du SPVM. On sait que l’exigeance de bonnes performances en natation peut être une barrière à l’embauche dans certaines commmnautés.
En ce qui concerne moral des policiers noirs : « Il y a un espoir, mais il ne faut pas maintenant les décevoir. Ce qui m’inquiète un peu, c’est l’insidiosité dans le système, le silence de certains, des gens qui n’osent pas parler. »
« Moi, je vais bien, très bien même. J’ai adoré Longueuil, mais ici, c’est chez moi, et je suis heureux d’y revenir. »